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Le Jura Vaudois

Une histoire minérale et végétale

Il y a cent millions années, une mer tropicale occupait l’espace actuel du Jura. Dès l'éocène, le Jura va peu à peu émerger. Le massif acquière sa forme actuelle, lors des grands bouleversements tectoniques du tertiaire. Depuis ; les glaciations, l’érosion, et la pression anthropique, et celle du bétail, en ont fait une chaîne de montagne parsemée de forêts, et de pâturages, regorgeant de fleurs.

L'histoire de la végétation jurassienne est intimement liée à celle des Préalpes. La flore du Jura est, dans son ensemble, la même que celle des montagnes de nature calcaire, qui forment la ceinture extérieure des Alpes. Flore éminemment calcicole, ou se constate l'absence à peu près complète des plantes silicicoles.

Géobotanique de la chaîne du Mont Tendre

L’alpage du pré de Mollens est situé dans le Haut-Jura vaudoi, sur le versant oriental de la chaîne du Mont Tendre. Son chalet est 283 mètres en contrebas du sommet. Les deux alpages ; Mollens, et le chalet neuf du Mont Tendre, sont mitoyens.

Peu érodé, le seuil inférieur, aux pentes inclinées, s’élève Jusqu’à 1300 mètres. Puis, apparaît un plateau, aux ondulations interrompues par des dolines peu profondes. Au-dessus de 1470 mètres, le terrain se redresse, pour former la chaîne du Mont Tendre, et atteindre 1683 mètres à son point culminant.

Ici, les roches du Jurassique supérieur sont très résistantes à l’érosion. La chaîne du Mont Tendre est une vaste succession de plis convexes, et de replis secondaires. Le niveau le plus bas est constitué de calcaires blancs. Au-dessus, la roche moins claire, et plus compacte, finit par faire place à des marnes, ou des calcaires feuilletés. L’ensemble représente une masse d’une épaisseur de deux cent à trois cents mètres.

La couche de terre est d’épaisseur variable : très faible le long des pentes, en grande quantité dans les combes, et les dépressions.

Le sous-sol est formé de calcaire fissuré, qui fonctionne comme une éponge. La plus grande partie des précipitations pénètre dans les profondeurs de la montagne. Les sources y sont rares, et d’un faible débit. Lessivée par la fonte des neiges, et l’eau pluviale, la terre est généralement pauvre en chaux, et en acide phosphorique.

Ce paysage est marqué par un climat montagnard particulièrement rude. Ses bois, et forêts, abritent bon nombre d'espèces emblématiques du Jura vaudois.

La falaise de la Roche Perrause

A mi-hauteur entre le Mont Tendre et le chalet du pré de Mollens, il existe un escarpement rocheux, visible depuis le chalet d'Olivier. Cette falaise dite "haute", avec un à pic de plus de trente mètres, est nommée "Roche Perrause", ou "roche Perrausaz". Une fois atteint le plateau de sa sommité (1 555 mètres), elle nous gratifie d'une vue remarquable sur la plaine lémanique et le lac Léman, barrée à l'horizon par la chaine Alpine. Mais qui s'y rend, sera surtout saisi par la vision du Creux-des-Fayes, une vaste dépression boisée, qui courre en contrebas de la paroi verticale, avant de faire place aux verts pâturages du pré de Mollens et à ceux du pré de Ballens.

Le lieu fait partie de la réserve Pro Natura Vaud du Mont-Tendre, et de la Roche Perrause, créée en 1969. Elle a pour but de protéger la flore des affleurements rocheux et des pâturages montagnards, proches du sommet.

L'escarpement rocheux

Vidéo d'Olivier le berger

Un impressionnant panorama sur la plaine lémanique et le Creux-des-Fayes.

Samuel Aubert - La Sentier n° 110 (1944)

Le hêtre...

Les combes

Des couches sédimentaires, d'épaisseurs réduites, plus tendres, ont formé de faibles dépressions longitudinales, que l’on appelle les "combes".

Le chalet se situe sur un plateau dégagé accidenté par des combes, parallèle à la ligne de crête du Mont Tendre. La flore y est constituée d’espèces méditerranéo-montagnardes et alpines. La source proche du chalet se situe dans l’une de ces combe peu profondes. Elle permet une rétention locale de l'eau, et constitue l’un des lieux où peuvent venir s’abreuver les génisses.

On y rencontre fréquemment : La Gentiane jaune (gentiane lutea), La Gentiane de printemps (Gentiana verna L), le Faux hellébore (veratrum album).

Les dolines

Les crêtes d’inclinaison modérée, striées de vallonnements, sont séparées par des dépressions présentant des dolines. Les dolines sont des dépressions circulaires, dues à l’érosion des calcaires (en contexte karstique), au fond desquelles séjourne longtemps la neige.

Ici, les dolines peuvent être larges, et de profondeur moyenne, ou petites et très profondes. Leur fond riche (des argiles de décalcification) présente une végétation alpine typique des "creux de neige".

Par l’aureur

Un sol dynamique et évolutif...

Dolines et ouvalas

Un accident rarissime

$Diaclases, fractures dans une roche$

D'alpage en alpage, la nouvelle c’est très vite propagée. Lors d'un contrôle, au passage de Betty, le sol s'est dérobé en l'aspirant dans un trou. Dans sa chute, elle a instinctivement écarté les bras pour se maintenir en surface, ce réflexe lui évitant d'être entièrement "mangée" par la dépression circulaire d’une profondeur inconnue qui venait subitement de s'ouvrir sous ses pieds.

Par la suite, en visite au chalet, elle nous a raconté qu'elle n'avait pas eu le temps de réaliser, tant cet incident, qui aurait pu être dramatique, avait été soudain. Dès qu'elle avait pu se dégager du trou, son premier souci avait été de redescendre à son chalet, y prendre du barbelé et des piquets, et remonter baliser la zone dangereuse. Pour elle, en cet instant une seule chose comptait : sécuriser la cavité béante. Ce n’est que bien après, une fois la tension retombée, qu’elle a pris la mesure du danger auquel elle venait d’échapper, et qu’elle a été saisie d’une terrible angoisse rétrospective…

Même si le diamètre de la doline n'était pas très large, cette mésaventure aurait pu être fatale à Betty. Ces formations géologiques, liées au milieu karstique, peuvent avoir, dans le Jura Suisse, une profondeur de 10 à 20 mètres. Entraînée sous terre, Betty aurait pu y rester, consciente ou non, pendant plusieurs heures, voire plusieurs jours, avant que sa disparition soit signalée. En outre, les secours auraient très probablement orienté leurs recherches en priorité sur des trous ou des gouffres déjà connus et répertoriés, la nouvelle doline, de faibles dimensions visibles, n’attirant quasiment pas le regard.

Ici, ce phénomène est bien connu des bergers. Les dolines sont causées par l'eau coulant dans les sols, elle dissout la roche calcaire et provoque la formation d'un vide, dans lequel les sédiments de surface s'effondrent. Ce type d'accident est la crainte des bergers pour leurs bêtes, il peut arriver que l'une d'elles se fasse piéger par un trou dans le sol, mais personne, dans la région, n’a le souvenir d’un être humain aspiré par un gouffre.

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Les ouvalas

Cf Futura Planète – article de Claire König, Enseignante Sciences Naturelles

Constitués de bancs de calcaire en retrait les uns des autres, les ouvalas ont souvent une forme d'amphithéâtre voire circulaire, d’un diamètre variant entre quelques dizaines de mètres et un kilomètre. Leur fond peut être accidenté, avec des dépressions secondaires, percé de dolines, de crevasses ou de gouffres. Dans d'autres configurations, leur soubassement est encombré de pierres ou de moraines ; ainsi, l'ouvala du Creux-d'Enfer de Druchaux, situé sur le flanc sud de l'anticlinal du Mont-Tendre, est considéré comme le plus beau lapiaz (entablement rocheux parcouru de fissures) de la région.

L’ouvala de Druchaux est riche en flore calcicole de prairies maigres et en flore forestière d’humus brut. Sur le champ de lapiaz (ou lapiez), qui s'étend sur près d'un kilomètre, des arbres de petites tailles poussent dans certains diaclases (Fractures dans une roche sans que les parties disjointes ne s'éloignent ou ne se décalent l'une de l'autre).

Au point le plus bas de cette dépression, entourée de nombreuses dolines, on trouve la glacière de Druchaux avec à quelques mètres le Trou de l’Aurochs, une doline particulièrement profonde. Cette zone basse est occupée par un sol épais et toujours humide ou se développe une flore bryologique (cryptogames : mousses, lichens).

Les ouvalas, comme les dolines, sont des réceptacles pour l'air froid nocturne. La température, par inversion thermique, y descend souvent en dessous de 0 degré, même en été. Ce refroidissement nocturne atteint régulièrement des valeurs de 10 à 15 degrés par rapport aux zones situées au-dessus de la dépression, y créant un microclimat froid. A L’ouvala de la Perrausse, les valeurs minimales extrêmes enregistrées en hiver sont de -36 degrés.

Philippe SCHOENEICH, Institut de Géographie/PACTE Territoires, Université de Grenoble

L’ouvala de la Perrause

Située au flanc NW du col du Marchairuz, dans le Jura vaudois, l’ouvala de la Perrause (-15 mètres par rapport au seuil) s'ouvre sur une voûte anticlinale, à l’altitude de 1330 mètres. Elle fait partie d'un ensemble de cuvettes qui se déversent les unes dans les autres. Un peu plus au sud se trouve l'ouvala de la Plateforme (-12 mètres par rapport au seuil). L'ensemble forme une grande dépression exploitée en pâturage ; au centre de cette dépression, dans les points les plus bas, une pessière (forêt d’épicéas) naine s'est développée sur des effleurements calcaires de lapiaz.

Par l'auteur

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Lapiaz

Les glaciations ont laissé des traces visibles : les moraines, roches polies et striées ; ainsi que de grandes dalles horizontales calcaires, qui offrent des affleurements inclinés plus ou moins continus. Elles forment des nervures minérales, émergent à un mètre au-dessus du sol gazonné, ce sont le lapiaz si caractéristique du haut de l’alpage.

Certaines parties de Lapiaz sont boisées, ses lieux chaotiques sont recouverts de mousse et d’une importante épaisseur d’humus. Ici la végétation est essentiellement composée des éléments humifères de la haute forêt jurassique.

Dans les parties à découvert, le lapiaz se couvre par endroit d’un gazon serré, et tapissant, où s’épanouissent de nombreuses espèces herbacées. Ce phénomène en a exclu les espèces alpines ; qui, pour survivre, ont trouvé refuge dans les fissures formées par les dépressions du Lapiaz (véritable fossés séparant les dalles).

Anémone des Alpes (Anemone alpina), Globulaire à feuilles cordée (Globularia cordifola) apparaissent fréquemment sous la forme de colonies plus ou moins étendues sur les dalles, ou les surfaces caillouteuses.

A hauteur de "la Roche Perrause", on pénètre dans la zone la plus élevée de l’alpage du pré de Mollens. Formée de pâturages à pentes très raides, ces prairies possèdent une flore assez mélangée aux espèces communes, d'un caractère sylvatique, pastoral, ou subalpin, auxquelles vient s’ajouter un fort contingent d'espèces des Alpes.

Pédogénèse