Mont Tendre, le plus haut sommet du Jura Helvétique
Située en Suisse occidentale, la large crête du Mont Tendre est bordée, au sud-ouest, par le col du Marchairuz (1 447 m), au nord-ouest, par la Vallée de Joux, au nord-est, par le col du Mollendruz (1 184 m), et au sud-est, par la plaine du Jura appartenant au Mittelland (nom allemand du plateau suisse). A son point culminant (le Mont Tendre), son versant sud surplombe le Crêt de Mondisé (1 525 m). Au-delà du col du Marchairuz, la crête se poursuit en direction du Crêt de la Neuve (1 494 m), et du Mont Pelé Suisse (1 532 mètres), suivi du Noirmont (1 567 m).
Au premier printemps, une course au Mont Tendre, dans la lumière et la paix d'un beau jour, est un enchantement, une fête pour les yeux et pour le cœur...
Samuel Aubert - la Revue du Dimanche
De la buvette du Mont Tendre, c'est par une marche d'une quinzaine de minutes, en passant par le Crêt des Danses, qu'on atteint le point culminant du Jura Suisse (Le Mont Tendre 1679 m). Le sentier est situé derrière le chalet, juste sous le sommet et suit la ligne de crête, soulignée par un long mur en pierres sèches. Seuls les derniers mètres de la montée peuvent présenter une petite difficulté, bien que, pour certains, la difficulté première réside dans le fait de passer entre le troupeau de vache d'Hérens, très exotique pour la région, qui souvent ne manquent pas de prendre possession du chemin. Même lorsqu’elles sont écornées, leur forte corpulence, leur robe d'un noir profond, en intimident plus d'un... Promeneurs accompagnés, pensez à garder vos chiens en laisse.
Sur les hauteurs du Mont Tendre, un point de vue incomparable à 360°
Depuis le plateau Vaudois, le Mont Tendre semble tout en rondeur et se fait discret, sa sommité se distinguant assez mal de l'ensemble de la chaîne jurassienne. Du côté de la vallée de Joux, dès qu'on prend un peu de hauteur pour les observer, ses trois mamelons allongés et réguliers (chacun dépassant les 1 600 m), séparés par des dépressions en forme d'entonnoirs, se détachent plus nettement. Mais vu d'en bas, aucun de ses deux versants ne semble imposant, et rien ne paraît de la beauté qui attend celui qui se rend à son sommet. En atteignant le point géodésique qui coiffe le Mont Tendre, sur son mamelon le plus haut (1678,8 m), il découvre une vue à 360°, balayant tous les environs et bien au-delà... Offrant un panorama incomparable, propre à émerveiller le promeneur le plus blasé.
Si, perché sur la cime la plus élevée de la chaîne Jurassienne helvétique, on regarde vers le sud, c'est le Mont-Blanc, avec ses 4 810 mètres, qui retient d’abord l'attention. Entouré de hauts sommets alpins culminant à plus de 4000 mètres (Grande Rocheuse, Aiguille Verte, Aiguilles du Diable, Grandes Jorasses...), souvent coiffé de son chapeau de nuages, il domine de toute sa masse la chaîne des Alpes, que l'on peut parcourir des yeux depuis les cantons d’Unterwald et de Berne jusqu’au Dauphiné, en découvrant des sommets renommés :
- L'Eiger (3 970 m),
- La Jungfrau (4 158 m),
- Les Diablerets (3 210 m),
- Le Cervin (4 478 m),
- Le grand Combin (4 314 m),
- les Dents du Midi (3 257 m),
- le Mont Pourri (3 779 m).
En contrebas, on plonge sur le plateau lémanique, qui dévoile dans sa totalité l'étendue bleue du lac Léman. Dans la plaine s’éparpillent des villages au milieu de champs cultivés et de petites étendues boisées; sur les rives, les villes : Lausanne, la plus proche, et plus loin Vevey et Montreux; en face, la côte savoyarde française, avec Evian et Thonon les Bains. A l'ouest, à l'extrémité du plus vaste plan d'eau douce d'Europe occidentale (le Lac Léman à une superficie de 580 km² sur une Longueur 73 km), visible par temps très clair, apparaît au loin Genève et son célèbre jet d'eau.
Si on baisse encore les yeux sur le versant sud du Mont Tendre, en deçà du Crêt de Mondisé, ce sont les chalets d'alpage du pré de Mollens et de Ballens que l'on distingue entre les épicéas. Les conifères et la topographie, laissant à peine deviner, sur la gauche au-dessus du chalet de Mollens, le petit plateau qui marque le décrochement de la Roche Perrause (un à pic de 35m), autre point de vue remarquable sur la plaine lémanique.
En continuant vers l'ouest, quand le regard remonte vers le fond des crêtes, il croise immanquablement la Dôle. Avec ses 1677 mètres, c'est le second plus haut sommet du Jura suisse. Elle surplombe au sud-est le sommet de La Barillette (1528 m) et au nord le village des Rousses. Le 26 octobre 1779, son sommet a reçu la visite du poète J-W Von Goethe, qui, impressionné, a déclaré : « Il n'y a point de termes pour exprimer la grandeur et la beauté de ce spectacle ». Il est permis de s’interroger sur sa réaction si l'occasion lui en avait été donné de monter jusqu'au Mont Tendre…
Derrière la Dôle, bien plus au sud, du côté français, on imagine plus qu’on ne voit le Reculet (1 718 m) et le Crêt de neige 1 720 m, les deux plus hauts sommets de la chaîne jurassienne.
Après le Noirmont (1 567 m), passé le Bois d'Amon, le regard s’égare sur le versant nord du Mont Tendre, avec la vallée de Joux, dominée par la forêt du Risoux, à la frontière vers la France et se perd dans l’immensité jurassienne qui court à perte de vue, alternant anticlinaux et synclinaux.
A peu de distance, toujours en regardant au nord, mais très légèrement vers l'est, une longue ligne de sapins, parallèle à la crête, surmontée d'une légère brume bleutée, révèle pour l'observateur attentif l'emplacement des lacs de Joux et du Brenet, dissimulés aux regards par les plissements et les arbres. En direction du nord-est, après les toits rouges des alpages de la Duchatte et de Bucley, c’est la Dent de Vaulion (1482,6 m), et plus loin encore au nord, apparaît le Mont d'Or (1 463 m).
En levant les yeux vers le second des trois mamelons du sommet, qui culmine à 1 672 m, on aperçoit le chalet de la Racine (1509 m), et encore au-dessus, 80 m plus haut sur la gauche, celui de Yens, célèbre pour sa Baume, recensée comme la plus haute cavité du Jura Suisse (1 650 m). Le chalet fait partie intégrante de l'alpage du Mont Tendre.
En progressant à chaque fois de quelques degrés vers l’est, après avoir passé le sommet du Suchet (1 588m) et les Aiguilles de Baulmes (1 559 m), le regard peut courir au loin, à la recherche sur l'horizon de la ligne bleue des Vosges. Puis le regard redescend sur le plateau, avec l'apparition du lac de Neuchâtel et de la plaine de l'Orbe, suivie des premiers contreforts alpins menant à l'Oberland Bernois. Plus loin, ce sont les hauts sommets valaisans, avec la Pointe Dufour (Mont Rose), à 4 634 mètres d'altitude, le plus haut sommet de Suisse et le deuxième plus haut sommet du massif des Alpes, qui couronne l'extrémité valaisanne du lac Léman.
"Devant" et "derrière" la montagne
Chaque versant de la chaine sommitale du Mont Tendre, s'appuie sur deux plateaux (le premier au nord-ouest et le second au sud est). Les anciens de la vallée de Joux, avaient pour coutume de parler du "devant" et du "derrière" de la montagne. Le "derrière" étant, pour eux, le versant du Mont Tendre caché à leur regard, celui qui surplombe le plateau Vaudois, de la route du Marchairuz à la combe de la Verrière. Par "devant", depuis la vallée de Joux, le versant est surtout constitué de pentes uniformes et gazonnantes, qui contrastent avec son versant opposé, fait de combes percées de dolines, entrecoupées de profondes nervures rocheuses, malmenées par l'érosion. En contrebas de ces "mauvais lieux" apparaissent des forêts, ayant repris possession des régions autrefois dévastées par le charbonnage.
Situé entre le sommet et l'alpage du pré de Mollens, un plateau battu par les vents, interrompu par l'à-pic de la Roche Perrause, forme un belvédère remarquable pour contempler cette "mer forestière".".
Matin d'été sur le Mont Tendre
Vidéo d'Olivier le berger
Promenade d'été, après le levé du soleil, dans l'air venteux du Mont Tendre.
Le Mont Tendre, une montagne battue par les vents
Le Mont Tendre, en toutes saisons, est soumis aux assauts du vent d'ouest, appelé aussi "le Joran". La violence du vent et la rigueur du climat sont les deux principaux facteurs du quasi déboisement de ses mamelons sommitaux. Les creux en entonnoir, qui séparent les trois mamelons, ainsi que les vastes dépressions qui parsèment le sommet, sont autant de pièges à froid, où l'hiver, sous l'action du vent, s'accumulent de grandes quantités de neige. A l'abri des courants d'air, ces dernières forment des murs pouvant atteindre quatre à cinq mètres de haut, dont les traces restent encore présentes tard dans l'été.
Déclin du jour sur le Mont Tendre
Vidéo d'Olivier le berger
Le Mont Tendre, dans l'heure qui précède la tombée de la nuit.
Les grands Crêts du Mont Tendre
Un crêt est une éminence, une colline ou simplement une pente. Aussi dans notre langage local, vous entendrez souvent ces deux expressions : en haut crêt, en bas crêt. Le terme a servi à désigner des agglomérations édifiées sur ou contre un crêt.
Samuel Aubert
Au sud-ouest, les grands crêts, se situent à quelques degrés près, dans le prolongement du Mont-Tendre. L'appellation est locale, leur nom cartographique étant la Pierre du Couteau. Fut une époque où le village des Bioux, dans la vallée de Joux, produisait des couteaux et des serpettes de vignerons, qu'il exportait "par derrière" le Mont Tendre, en passant par les Grands Crêts. On prétend qu'un couteau aurait été au centre d'une sombre affaire (tragique ou non), donnant ainsi son nom aux lieux.
C’est en 1928, lors du creusement des fondations d’une cabane sur le flanc sud du crêt, que la découverte d’une serpette de vigneron a apporté la preuve du passage des couteliers des Bioux par les Grands Crêts.